HADOPI : “ON NE NOUS DIT PAS TOUT”

Publié le par J-MENECHAL

Parmi les justifications les plus communes au piratage d'œuvres musicales sur Internet, le prix prohibitif des albums est sans doute en première place. Il n'est pas rare en effet de voir le prix d'un CD dépasser les 20 euros, une somme de moins en moins en phase avec la valeur attribuée à une dizaine de titres. Est-il justifier pour l'industrie du disque de vendre ces produits à de tels prix ? C'est ce que nous souhaitons ici vérifier en étudiant la répartition complète de l'argent donné par le consommateur au revendeur.


Etudions donc ensemble la répartition du prix d'un CD Audio vendu en grande surface ou dans un magasin spécialisé type FNAC. Pourquoi et qui gagne de l’argent sur un CD ? Cette excellente question (merci à celui qui la pose) n'est pas des plus simples à répondre, mais nous devons dire d'emblée que la distribution actuelle (dite "standard") revient cher !

Description du processus d'élaboration et distribution du disque, depuis les premières notes composées par l'artiste jusqu'à l'étalage dans les rayons du disquaire


Voici les différents acteurs sur le circuit standard de la chaîne musicale, depuis le créateur du titre jusqu'à vous :

1. Auteur, compositeur -- Création de l’œuvre

2. Artistes-interprètes -- Interprétation de l’œuvre

3. Producteur -- Enregistrement de l’interprétation

4. Editeur phonographique -- Fixation/reproduction de l'oeuvre (CD, K7..)

5. Distributeur -- Distributions des supports

6. Grossiste -- Vente des supports destinés à la revente

7. Détaillant -- Vente des supports au public

8. Utilisateurs final -- Ecoute du support

Ce circuit basique est présent pour la plupart des CD que nous trouvons dans le commerce. Chaque partie a son importance et, malheureusement, elles ont toutes besoins des autres.


L’auteur/compositeur est le créateur de l’œuvre, il peut être aussi son interprète. Ensuite le producteur, la première personne qui investira dans l’artiste pour le faire enregistrer, fera également sa promotion, gérera ses dates de concerts, et le poussera (si l'artiste en a sa chance) "vers le haut !". Puis vient évidemment le pressage des CD, avant que la distribution ne fasse son entrée. Pendant tout ce temps le prix du disque n'a fait que monter, et il faut encore que le grossiste envoie les CD aux détaillants suivant les commandes et l'évaluation des ventes. Finalement vous, nous, acheteurs de l'album, payons tout ce beau monde.


Mais analysons plus précisément ce qui coûte vraiment cher dans la chaîne. La répartition du prix d'un CD n'est pas une science exacte. Elle dépend de tous les contrats négociés entre les différentes parties. L'exemple suivant prend en compte un CD acheté d'une valeur de 20€ avec des chiffres approchant au mieux la réalité du secteur. Enlevons la TVA (19,6% en France, soit 3,28 €), il nous reste 16,72€ à partager entre les différents acteurs de la chaîne.

Le prix d’un CD sur ce système pourrait donc être évalué comme ceci :

Source : Snep

 

7% (1,17€) pour les paroliers. C’est peu, mais une fois la chanson écrite, que dire...

19% (3,18 €) pour l’interprète sur les 16,08 € du départ. Ce pourcentage qui peut paraître faible est très controversé. Sur certains artistes, on serait plus proche de 10% (moitié moins !)... Tout cela dépend de la "valeur" de l’artiste, de son poids dans la balance lors des négociations : connu/inconnu, grosse promotion/petite promotion, etc.
22% (3,68€) pour la distribution. Toujours aussi gourmande, cette portion n’est pas des plus réduites. La grande distribution reste fidèle à elle-même, y compris sur les CD...



52% (8,69€) pour les maisons de disques, ça peut faire froid dans le dos, mais détaillons plutôt ces 52% !

Voyons donc comment se justifient la part de 52% prise par les maisons de disques :


Source : Snep


Des frais d’enregistrements très réduits, une bonne marge, de quoi faire une bonne maison de disque. La promotion est très chère, et la fabrication du disque « bien calculée » puisque le pressage coûte en moyenne de 0,50€ à 0,70€, plus la conception de la pochette.

Résumons :

Sur les 20 € donnés au caissier, nous avons en fait donné en moyenne :


8,69€ à la maison de disque,

3,68€ au magasin et aux grossistes,

3,18€ aux artistes interprètes,

1,17€ aux paroliers et compositeurs

et enfin, 3,28€ pour la TVA de 19,6%.



Les maisons de disque prennent donc sans surprise la plus grosse part du gâteau, et c’est sans nul doute de leur part qu’un effort devrait venir. Dans un environnement numérique, leurs frais de promotion pourraient par exemple considérablement baisser, en utilisant Internet comme outil de marketing viral, ce qui aurait également pour le consommateur l'avantage (et non le moindre) de se voir proposer des oeuvres de meilleure qualité. On sait qu’une baisse du prix des CD crée une augmentation des ventes. Lorsque la FNAC a part exemple baissé les prix de certains CD, il s’en est résulté une augmentation des ventes de 500 à 1000% !


Faut-il baisser la TVA ? Non !



Contrairement au mouvement en cours qui souhaite faire baisser la TVA, nous prenons le parti que la baisse du prix doit venir "des majors", l'Etat ayant déjà fait assez d'efforts ! En 1987, la TVA sur les disques était de 33,6% et la taxe fut baissée à 19.6%. Les achats ont alors augmenté de 91%. Dans le même temps, le prix du CD dans les magasins n’avait lui baissé que de 8% (sur les 14% effectifs !). Les 6% restant sont partis à l’époque dans les poches des maisons de disques et des réseaux de distribution pour développer leurs activités et accroître leur position monopolistique....

Les majors et autres distributeurs ont gonflé leurs revenus grâce à cette baisse de la TVA (c'est-à-dire grâce à la perte d'argent public nécessaire au développement de la société dans son ensemble), alors qu'ils pourraient eux même faire un effort et baisser leurs marges si importantes, comme l'a prouvé Universal Music en annonçant récemment une baisse de 30% sur le marché américain...

Source : Numérama

 

 

Ne pas oublier qu'Hadopi c'est surtout l'obligatoire installation d'un mouchard sur son ordinateur. Cette loi pénalise la non-installation de ce mouchard.

 

En cas de téléchargement illégal, il est impossible de prouver qui est l'auteur du téléchargement (un ordi est toujours susceptible d'être piraté, il peut y avoir plusieurs utilisateurs), en revanche si le mouchard est manquant, le propriétaire légal de l'ordinateur sera responsable de cette non installation et pénalisé pour ce manquement.

Publié dans National

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S
Donc si je comprend bien, vous dénoncez le fait qu'Hadopi c'est l'installation d'un mouchard sur nos ordinateurs, le fait qu'on ne peut pas prouver qui est réellement en train de se servir de la connexion, MAIS vos 2 députés s'abstiennent lors du vote d'Hadopi ?! Certainement l'effet du retour du MPF au bercail UMP ! On n'ose plus voter contre le texte du chef, on s'aligne, on se tait !
Répondre
J
<br /> <br /> Je pense que nous n'avons pas la même lecture, mais merçi pour votre assuidité, veuillez trouver le discours de notre Député Dominique Souchet, député au parlement.<br /> <br /> <br /> <br /> Vendredi 18 septembre 2009,Il y à 2 heures<br /> <br /> Si vous avez un doute, consultez l'article ci-dessous;Vendredi 18 septembre 2009,Il y à 2 heures sur MPF 48<br /> <br /> <br /> <br /> Hadopi 2 : un<br /> texte difficile à mettre en œuvre !<br /> <br /> <br /> <br /> <br /> Notre opposition au premier projet<br /> de loi Hadopi était fondée sur le fait qu’il constituait une restriction des libertés et une négation du principe de la présomption d’innocence, puisqu’il prévoyait une<br /> double-peine, c’est-à-dire la double sanction pour l’internaute présumé fautif, qui se serait vu privé de son abonnement Internet tout en continuant à le payer.<br /> <br /> <br /> Cependant, nous sommes sensibles à la nécessité de protéger les œuvres des<br /> artistes sur internet. Ainsi, nous n’avons pas voté contre le projet de loi Hadopi 2. En revanche, nous n’avons pas voté en faveur non plus car l’application de cette loi sera difficile à<br /> mettre en place, et ce pour trois raisons majeures :<br /> <br /> <br /> _il est toujours impossible de distinguer le propriétaire de l’ordinateur de<br /> l’utilisateur frauduleux ;<br /> <br /> <br /> _les coupures d’internet vont pouvoir être contestées facilement, engorgeant au<br /> passage les tribunaux déjà surchargés ;<br /> <br /> <br /> _les utilisateurs d’Internet devancent déjà l’application de cette loi par des<br /> systèmes de partage privés ou de streaming.<br /> <br /> <br /> Tout l’enjeu d’une telle loi réside dans sa capacité de respecter à la fois les<br /> libertés des internautes ainsi que de leur présomption d’innocence et le droit de propriété qu’ont les artistes sur leurs œuvres. Ainsi, nous  préconisons toujours la mise en place d'une<br /> licence globale de téléchargement mais à la charge des fournisseurs d'accès à Internet, afin de rémunérer les artistes.<br /> <br /> <br /> <br /> Monsieur le Président,<br /> <br /> <br /> <br /> Madame le Ministre,<br /> <br /> <br /> Monsieur le Ministre,<br /> <br /> <br /> Mes chers collègues, <br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br />       Le projet de loi complémentaire que nous étudions aujourd'hui est d'une importance capitale pour le quotidien de millions de<br /> Français.  <br /> <br /> <br />       A la suite de la censure du Conseil Constitutionnel, le nouveau texte permet à la justice de recourir à des procédures<br /> simplifiées par la voie d’ordonnances pénales et devant le tribunal correctionnel siégeant à juge unique. Les atteintes aux droits d'auteur et droits voisins commises sur internet pourront être<br /> sanctionnées par la suspension de l'abonnement. <br /> <br /> <br />       Les réserves qui ont été les nôtres sur le projet de loi Hadopi 1 se reportent tout<br /> naturellement sur Hadopi 2 dès lors que la même logique l'inspire, que la même approche a été retenue et que l'ensemble du dispositif initial est reconduit à l'exception du volet pénal. Hadopi 2<br /> n'apporte pas non plus de réponse convaincante à la question du respect de la propriété intellectuelle sur internet : il est en effet déjà obsolète avant même son entrée en<br /> application. Pourquoi ? A cause de la multiplication des sites de contournement qui se mettent en place : sites opérant un changement automatique d'adresse<br /> IP dès que l'internaute s'y connecte ; sites permettant le cryptage des fichiers avant téléchargement ; sites détournant les réseaux VPN de leur usage initial. Le contournement de la loi est donc<br /> déjà en application. Adopter ce projet en l'état, c'est donc accepter de porter atteinte à la crédibilité du processus législatif lui même. Ce n'est pas sain. Seules durent les lois qui sont<br /> applicables et qui peuvent être respectées. <br /> <br /> <br />       Le second motif d'inquiétude, c'est que ce soit les particuliers les moins aguerris à l'usage d'internet, en particulier les<br /> familles, qui soient les plus pénalisés et non les pirates les plus avertis qui auront toujours la possibilité d'usurper l'identité d'un internaute et de lui faire porter la responsabilité<br /> d'actes de piratage qu'il n'a pas commis. <br /> <br /> <br />       A partir du moment où il est possible d'utiliser la connexion d'un tiers pour télécharger illégalement, il y a un risque que la<br /> loi sanctionne les victimes au lieu de sanctionner les coupables. Les « voyous de la toile » pourront donc continuer à vivre du téléchargement illégal en toute impunité. <br /> <br /> <br />      Pour autant, la production culturelle doit être défendue et ne pas être livrée aux pilleurs de la toile. <br /> <br /> <br />      Il convient donc d'envisager des solution alternatives. <br /> <br /> <br />       Dans un premier temps, il faut garantir aux internautes que leur anonymat ne sera pas menacé. C'est pourquoi nous sommes favorables<br /> à l'amendement, déposé par Monsieur le rapporteur, qui prévoit d'exclure la surveillance des e-mails. <br /> <br /> <br />       A moyen terme, nous devons déjà songer à l'après Hadopi, car je suis convaincu que cette loi montrera très vite ses<br /> faiblesses. <br /> <br /> <br />       Mon sentiment est que pour répondre aux deux problématiques que sont le respect des droits d'auteurs et la garantie des droits des<br /> internautes, nous ne pouvons pas faire l'économie de la mise en place d'une licence globale de téléchargement, en veillant bien entendu à ce qu'il n'y ait pas rupture d'égalité.<br /> <br /> <br />  <br />  L'industrie musicale s'ouvre peu à peu à cette idée en découvrant le potentiel économique qu'elle représente. Ainsi l'ancien président du Conseil d'administration de la Sacem, Monsieur<br /> Laurent Petitgirard, expliquait il y a huit jours qu'il était favorable à cette formule :<br /> <br /> <br />   <br /> <br /> <br />  <br /> « Il ne s'agirait évidemment pas de légaliser l'échange sauvage de fichiers via le peer-to-peer, mais de fournir une licence qui donnerait accès à des sites de téléchargement<br /> correspondant aux différents fournisseurs d'accès et fournis en fichiers sains par les producteurs, où l'abonné pourrait télécharger toutes les œuvres qu'il voudrait ».<br /> <br /> <br />  <br />  L'instauration d'une taxe de l'ordre de 6 euros par exemple, payée pour une moitié par le fournisseur d'accès à internet et pour l'autre par son client, serait économique<br /> viable. Si l'on prend en compte les 18 millions d'abonnés haut débit en France, une telle disposition permettrait au marché du disque de doubler le volume  de ses recettes pour atteindre 1,3<br /> milliard d'euros par an, sans pour autant menacer la liberté des internautes.<br /> <br /> <br />  <br />  Cette évolution des mentalités s'observe également à l'étranger. Aux États-Unis, par exemple, Warner Music travaille depuis maintenant quatre mois à un projet de licence globale<br /> en collaboration avec les fournisseurs d'accès Internet, ce qui confirme que cette voie mérite d'être sérieusement explorée. <br /> <br /> <br />       En définitive, Hadopi 2 risque de poser plus de problèmes qu'il n'en résoudra et le moment viendra inéluctablement où nous<br /> devrons substituer à un dispositif de surveillance intrusif, lourd et inefficace, un système de licence globale crédible et applicable permettant de rémunérer les artistes sans attenter à la<br /> liberté des internautes. <br /> <br /> <br /> Sauf erreur de ma part, nos députés sont contre.<br /> <br /> Bonne journée<br /> <br /> PS: je ne vous souhaite pas d'être piraté !<br /> <br /> <br /> <br />